L’entreprise Morel est une entreprise centenaire spécialisée dans la production de cyclamens implantée à Fréjus. Trois générations d’horticulteurs ont fait émerger une activité florissante sur le marché national et international. Rencontre avec Olivier Morel qui nous explique l’importance du tryptique recherche, famille et préservation du savoir-faire.

Comment une entreprise comme la vôtre devient-elle centenaire ?

Les clés de la longévité, c’est la persévérance. Il faut 8 à 10 ans pour réaliser des hybrides de cyclamens, un délai qui a rebuté un certain nombre d’entreprises, faute de temps et de budget pour investir sur du long terme. Nous avons été la première société privée à réaliser des hybridaires F1 à partir de la génétique qu’avait collectionnée mon père. Mon frère Guy a débuté les recherches d’hybride F1 en 1975 avant que nous puissions sortir les premières variétés commerciales à la fin des années 80.

Quelle est la place de la recherche dans ce succès ?

La recherche est indispensable dans notre secteur, 80% de l’activité y est consacrée. L’autre élément qui a fait la différence est que nous avons été les premiers à produire des hybrides F1 dans un climat du sud. Quand on sélectionne toujours dans un même type de climat, on appelle cela une pression de sélection. En le faisant dans un climat chaud, cela permet aux plantes de résister à la chaleur. Cela a été la clé de notre succès pour prospecter des marchés comme l’Espagne, l’Italie, les Etats-Unis, Israël, le Japon…  Aujourd’hui nous commercialisons directement dans près de 45 pays, avec la vente indirecte cela représente un total de près de 75 pays.

Quelles sont les autres clés de ce succès ?

Le fait que l’entreprise soit familiale. Parce que tout n’a pas été rose. C’est la volonté familiale d’y arriver et de se soutenir les uns les autres qui fait que nous avons tenu dans la durée.

C’est le fruit du travail de plusieurs générations où chacun a apporté sa pierre à l’édifice.

Nous avons aujourd’hui cédé la société à Evolem, et avons pris un directeur général, pour assurer cette continuité. Toutes nos équipes qui ont fait le succès de l’entreprise sont toutes toujours ici et motivées pour continuer. Ce qui est important est que la société perdure avec les gens qui nous ont aidés à réussir. Que le savoir et l’activité puissent se transmettre.

Ce savoir-faire, de quelle manière avez-vous réussi à le préserver ?

C’est une question sensible. Nous étions quatre frères mais c’est mon frère Guy qui avait la connaissance des plantes, des hybrides, de leurs origines. Nous avions la crainte en embauchant quelqu’un pour travailler avec lui que cette personne parte avec le savoir-faire, comme cela se fait par ailleurs. Il était donc assez seul dans son rôle et nous l’avons assuré comme « homme-clé ». Puis sa fille nous a rejoints. Même si elle ne pouvait pas assurer de la recherche car elle n’était pas formée pour, elle a pu écrire tout le savoir-faire et les connaissances de son père sur un logiciel spécifique pour les chercheurs. Nous avons ensuite recruté une personne pour faire la continuité de la recherche, il y a une dizaine d’années. Mon frère l’a formé pendant 8 ans et il y a 5 ans, nous avons été rejoints par une deuxième personne. La fille de mon frère intervient dans le suivi des variétés et sur le volet commercial.

Avec le recul, le choix de tout miser sur une seule plante n’était-il pas un peu risqué ?

Certainement mais nous n’avions pas conscience de tout.

On réussit toujours avec une part d’inconscience !

En revanche ce qui est sûr est que quand une plante est un peu plus complexe, la concurrence est moins rude. Parce qu’avec le cyclamen, même après 15 ans de recherche vous n’êtes pas assuré que votre variété va plaire au marché. Les freins à l’entrée sont assez énormes. Le pari était risqué mais il a été gagnant.

Quels sont vos grands défis aujourd’hui ?

Les évolutions technologiques qui, après avoir concerné les plantes alimentaires comme le riz ou les céréales, les légumes et les fruits, arrivent sur le marché des fleurs. Nous sommes en veille technologique pour tout ce qui existe de nouveau pour nous et regardons pour travailler avec des universités, ou avec des laboratoires. Des partenariats sont déjà effectifs. Comme nous sommes une entreprise qui fait encore de l’artisanat d’art, la question centrale pour nous n’est pas le volume de production mais l’esthétique.

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Olivier Morel
Président
Société
Morel Cyclamens
Date de création
1919

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