ESKER est née en 1985, à la grande époque des éditeurs de logiciels comme Microsoft et Oracle. Son business est né d’un besoin client et d’une intuition qui a germé dans l’esprit de son patron fondateur Jean-Michel Bérard. Aujourd’hui, l’entreprise est présente dans le monde entier et a changé plusieurs fois de métier et de modèle économique. Une véritable épopée, pilotée par un aventurier de l’informatique.

Vous vous définissez plus comme un entrepreneur que comme un marketeur ?

Tout à fait ! Je suis entrepreneur par vocation. J’ai toujours voulu prendre mon destin en main, ne dépendre de personne et surtout aller dans la direction que je voulais. C’est grisant, au début… Les vingt premières secondes surtout ! Plus sérieusement, je ne me voyais pas faire autre chose quand je me suis lancé. D’autant qu’à 23 ans, c’est facile, on déborde d’énergie et on a rien – ou peu – à perdre.

ESKER a depuis l’origine une ambition internationale ?

Le marché français pour notre premier produit était trop étroit. Dès les premières années, nous avons souhaité l’élargir en nous installant dans d’autres pays européens. Nous avons commencé par trouver des distributeurs sur place, puis très vite nous avons créé des filiales en Europe, aux Etats-Unis, plus récemment en Asie et demain en Amérique du Sud, pour chercher des marchés plus dynamiques. Cela correspond aussi à mon côté aventurier.

En 2000, vous avez reçu le Grand Prix de l’entrepreneur. Une année de consécration ?

C’est surtout l’année où notre marché historique de l’émulateur de terminal s’est totalement effondré ! Ça a été très dur, nous avons cherché à rebondir tout en réduisant nos coûts. Parmi nos acquisitions, l’une de nos structures possédait un serveur de fax. En soi, ce n’était pas très excitant, mais nous avons pressenti que cette approche pouvait avoir du potentiel et nous avons cherché à comprendre ce que les clients faisaient des fax qu’ils recevaient. C’est à partir de là que nous nous sommes lancés dans la dématérialisation des documents. Cela a été un changement complet de métier.

Comment pilote-t-on une telle évolution ?

C’est chaud, très chaud. J’ai passé de nombreuses nuits blanches ! Nous avons muté en quelques années d’une approche de vente de produits sur étagère à 300/500 euros par unité à un mode solution qui nécessitait une forte compréhension des besoins clients associée à du consulting pour l’implémentation. Certains collaborateurs ont suivi, d’autres pas. Il a fallu que l’entreprise s’adapte. La mue s’est faite en 6 ans. Nous avons perdu de l’argent pendant plusieurs années mais nous avons tenu le choc parce que nous en avions bien gagné auparavant et que nous l’avions mis de côté !

Votre secteur d’activité implique une grande souplesse, une forte mobilité ?

Oui, nous vivons une révolution technologique tous les 4 ou 5 ans. En 2004, après avoir muté vers la dématérialisation, nous nous sommes rendu compte que nos technologies, très complexes, n’étaient accessibles qu’aux très grandes entreprises. Nous avons donc commencé à vendre nos solutions, en les hébergeant sur nos propres serveurs et en les proposant comme un service. C’était du Cloud Computing avant l’heure. C’est un changement radical, qui nous a amenés à pousser plus loin notre approche solution pour la proposer à des directeurs administratifs et financiers, sans nécessairement passer par les directions informatiques. C’est un modèle économique complètement différent : vendre une licence logicielle, c’est un chiffre d’affaires de 200 000 à 400 000 euros. Avec le Cloud, il faut attendre 2 ou 3 ans de mensualités régulières pour atteindre ces niveaux. Cela pèse sur le CA les premières années mais ensuite, c’est très solide et très récurrent.

Dans un métier en perpétuelle évolution, votre recette pour rester à la pointe de l’innovation ?

Il faut innover sans cesse. Nous n’avons pas le choix. Ce qui est important, c’est de rester en contact avec les clients et de bien comprendre ce qui se passe sur le marché. Personnellement, je m’occupe de l’Asie avec Singapour et la Malaisie où je visite tous nos clients plusieurs semaines par an pour comprendre leurs besoins, leurs difficultés, l’évolution du marché et ce que la concurrence leur propose. Ensuite, je reviens en France riche de ces témoignages et nous essayons d’y répondre au plus vite !

Votre prochain défi ?

Tirer profit de la logique des réseaux sociaux pour faciliter l’échange de documents de gestion. Aujourd’hui, 4500 clients utilisent nos solutions et communiquent avec 1,5 million d’autres entreprises à qui nous ne parlons pas du tout. Notre ambition est de constituer un réseau non pas social, mais business autour des factures, devis ou bons de commande en y ajoutant une dynamique collaborative. Nous sommes en plein brainstorming, beaucoup d’idées fusent, tout est à inventer ! Si nous réussissons ce challenge, notre croissance devrait considérablement accélérer !

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Le regard de Bruno Rousset

Mobile, adaptable, ouverte, les qualificatifs sont nombreux à pouvoir s’appliquer à l’aventure Esker qui n’a cessé depuis sa création d’évoluer, de se transformer, de se régénérer pour grandir encore. Et le terme « aventure » n’est pas une figure de style à son sujet quand on voit la capacité de son dirigeant, Jean-Michel Bérard, à défricher des métiers et à proposer des solutions clients totalement neuves, en partant d’une intuition, la bonne, au bon moment.

Dans son secteur d’activité comme dans bien d’autres, sinon dans tous les autres, les besoins d’un jour ne sont pas ceux de toujours. Et si Jean-Michel Bérard est un aventurier, c’est qu’il a aussi connu de lourdes difficultés, pris des coups, subi des revers de fortunes, sans jamais baisser les bras bien sûr, mais surtout en tirant les bonnes leçons pour dessiner autrement l’avenir, ce qui fait de lui un visionnaire. Un entrepreneur jusqu’au bout des ongles en somme.

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Jean-Michel Bérard
Président du Directoire
Société
Esker
Activité
Solutions de dématérialisation
Effectifs
285
Chiffre d'affaires
40,3 M€ en 2012

Logo de la société Esker, présidée par Jean-Michel Bérard